Journal personnel

de

 Martial d’Ambre

Prince de Rebma et Marquis de Cabra

[Note au lecteur : cette version html est encore en construction. Pour mieux vous faire une image de Martial, voici sa decription :
 Martial est assez grand (1 mètre 92), un peu frêle (environ 72 kg), souvent paré d’habits qui réhaussent sa faible carrure. Il a un visage long mais souriant, encadré par des cheveux noirs aux reflets verts, maintenus en catogan par un anneau d’argent. Ses yeus sont du même vert que ceux de son père, Corwin. Il aime bien les anoraks et les écharpes. Ses cols, écharpes ou reverts sont la plupart du temps blancs, ses vestes ou manteaux or, ses chemises et pantalons rouges sang. Son symbole, qui se retrouve au dos de tous ses atouts hormi ceux dessinés après sa rencontre avec la Licorne, est composé par deux plumes blanches entrecroisées sur un écu d’or reposant sur un champ de sang. Il porte un couteau bien équilibré pour le lancer sur l’intérieur de sa jambe gauche, et lorsqu’une épée est nécessaire, il choisit le plus souvent une lame à deux tranchants, droite et se maniant d’une seule main. ]

    Alors que j’écris ces premières lignes, dans ce paysage féerique que j’ai cherché juste exprès pour cela, je dois une petite introduction au lecteur de ces pages. Lecteur que la logique peut raisonnablement classer en trois catégories. Tout d’abord (et sans doute car la modestie n’est pas mon fort), il peut s’agir de la catégorie formée par moi-même, rédacteur de ce journal, Martial d’Ambre, Prince de Rebma et Marquis de Cabra, fils du Prince Corwin d’Ambre et de la Reine Moire de Rebma. Ensuite, même si personne ne risque avant longtemps d’entrer dans cette catégorie, il peut s’agir de quelqu’un, ami, amour ou sire à qui j’ai permis, autorisé ou demandé de lire ces pages. En ce cas, soit le bienvenue, ami, et puisse la lecture de ces lignes t’apporter une vision de mes actes, joies et peines qui puisse nous rapprocher encore. Enfin il peut s’agir d’une personne qui n’y a pas été invité. Je l’invite alors à reposer au plus vite ce volume à sa place, sans quoi, j’appelle sur lui et sur ses actes la Malédiction de la Grande Marelle d’Ambre, et qu’il ne puisse pas trouver le repos ni la joie avant d’avoir effacé du monde et des ombres toute trace des secrets ainsi dévoilés, par le sang et les larmes.

    Ainsi en ma vingt-sixième année je commence ce journal, qui sera rangé dans cette fosse d’atout que j’ai découvert il y a quelques jours. Il me faut donc commencer par faire un résumé de ces années, remplies s’il en faut, et tenter de ne rien oublier, ou si peut que ce soit de capital, tout étant, dans l’univers de cour et de paranoïa sourde dans laquelle je suis depuis maintenant trois ans, presque aussi capital que le reste.
    Aussi loin que portent  mes souvenirs, ma prime enfance c’est déroulé dans ce que j’ai maintenant appris à appeler une ombre, d’un tempo rapide et proche des Cours du Chaos. A Rilya (le nom de cette ombre), celui que je prenait à l’époque tantôt pour mon père, tantôt pour mon frère, a dû m’éduquer à survivre, car la violence était partout présente. C’est là que Martin, qui n’était que mon tuteur (je veux parler de Martin d’Ambre, qui est maintenant Dauphin Royal) commença mon éducation littéraire...et martiale. La vie n’était pas toujours facile, mais tout bien considéré, ces années ne furent pas bien loin de l’enfance normale d’un enfant masaï, les camarades de jeux métamorphes (super, çà !!) en plus. Cela dura jusqu’à ce que j’atteigne l’âge de douze ans, où Martin, un peu dépassé par toutes les questions que je lui posait, décida qu’il  était temps de trouver une ombre plus organisée où je pourrais aller au lycée en pension. Je pense maintenant qu’il avait aussi un peu envie de bouger lui-même et que cela était une très bonne raison de se réattribuer un peu de temps tranquille.

    Je restais donc quelques neuf ans dans une ombre appelée Clamaert. Là, je fus interne dans une importante institution (nous étions près de mille internes ) jusqu’à l’âge de dix-neuf ans. Les premières années, je n’était pas ce qu’il était convenu d’appeler un très bon élève. Le changement de méthode y était sans doute pour beaucoup. Et les caricatures des professeurs qui circulaient en cours ne me faisaient pas bien voir. Je me souviens aujourd’hui avec une certaine nostalgie de plusieurs fins de semaine passées à recopier  « Je ne ferais plus de dessins méchants et dégradants de mes professeurs ». A l’époque déjà, mon coup de crayon valait quelque chose. Je me suis donc mis au dessin, à l’aquarelle, à la sculpture sur glaise et même à la gravure à l’eau forte. J’ai obtenu un chouette succès à la fin de ma troisième année là bas lors de l’exposition de la fête du collège, en fin d’année. C’est à cette époque que j’ai connu Delphi... Mais je pense que j’en parlerai plus tard, ce n’est pas mon propos ici. Bref,  dès l’année qui à précédé cette expo, j’ai commencé à mieux me sentir dans cette ombre, et j’ai bifurqué vers des études d’arts et d’histoire de l’art. Curieusement, c’est à ce moment que mes notes en maths sont remontées (elles avaient jusqu’alors toujours plafonné à trois ou quatre sur vingt). Martin m’avait il est vrai ramené d’une ombre appelée Terre des gravures d’Escher... J’était, comme a écrit un de mes professeur « Prudent dans l’effort », sauf en ce qui concernait le dessin. Pourtant,  je comprenais vite et il suffisait qu’une leçon m’accroche ou que je veuille épater Martin pour que mes notes remontent soudain. Ce qui se passa en maths. A partir de seize ans, la discipline se relâchait un peu au lycée, et je pu partir en voyage durant presque chaque vacances. J’appris ainsi, tout seul, de nombreuses petites choses qui aujourd’hui encore me servent alors que je passe dans Ombre .

    Martin, dès que j’eus la maturité suffisante pour le comprendre, m’avait en peu de mots brossé la situation dans laquelle j’étais. Fils de gens très puissants mais qui avaient plusieurs ennemis féroces, ils m’avaient confié à lui pour me protéger, un certain Éric en particulier pouvant me vouloir peu de bien. J’avais donc dès le plus jeune âge pris l’habitude de regarder autour de moi si quoi que ce soi était étrange, inhabituel. En Clamaert, tout était tranquille, la plupart du temps. Je n’eus jamais l’occasion d’utiliser l’atout de lui que m’avait remis Martin peu après mon dix-huitième anniversaire. Mais, un an et demi plus tard, Martin m’emmena dans une autre ombre, l’ombre Terre. Après s’être assuré que mon adaptation se passait bien, il me laissa, et je ne le revit qu’une fois jusqu’aux événements d’octobre 1988, suivant le comput en vigueur sur cette ombre.

    Pendant trois ans, je vécu donc sur Terre, le plus souvent à Paris où Martin m’avait je sais maintenant comment procuré le moyen de rentrer à l ’école du Louvre. Je voyageait là encore souvent, pour mes études et mon plaisir, dépensant sans compter les copieux subsides que m’avait laissés mon tuteur. L’événement le plus notable fut alors bien évidemment la rencontre inopinée que je fis, l’après-midi du 3 février 1988, dans les salles du Metropolitan Museum de New York qui abritaient alors une exposition sur l’art indien et plus particulièrement celui des hautes régions du Cachemire. C’est en m’appropriant une peinture sur chanvre par un rapide croquis que je fis la connaissance de Hayora Toganara et Andrew Mac Quiligan, bientôt suivie de celle de Judith O’Hara et Jean d’Abalam. Andrew était alors critique d’art au New York Time, et, suite à la discussion que nous avions eu lui, Hayora et moi, il me proposa de co-signer sa rubrique consacré à l’exposition. J’acceptais avec plaisir, et nous allâmes tous les cinq dîner dans un restaurant français près de Central Park. Après le repas, alors que nous marchions vers un pub sympa, un gang de petites frappes (petites, mais musclées !) nous prit à parti. Nous nous défendîmes et j’eus la surprise de les découvrir tous armés, à l’exception de Hayora pour qui la connaissance des arts martiaux semblait suffire. Moi-même je dus sortir mon couteau, et l’abandonner à regret dans la gorge d’un des agresseurs. Alors que j’allais pour le récupérer, un autre malandrin m’immobilisa le bras, et je dus utiliser toute ma force pour le basculer. Je pense que ce sont les dégâts que je lui infligeait alors qui ont fait naître les premiers soupçons chez Hayora. Toujours est-il que nous les mîmes en déroute, et que Judith trouva normal d’en abattre un qui fuyait sans demander son reste. La soirée avait été mouvementée, nous nous séparâmes bientôt, mais je les retrouvais le lendemain pour l’article d’Andrew. Au cours des jours qui suivirent, nous sympathisâmes. Quelques mois plus tard, à Paris, je voulus me mettre à la sculpture sur métal. Avant de m’initier à l’orfèvrerie, je décidai que demander à Hayora de m’apprendre les rudiments de la ferronnerie. Sa facilité à bouger une enclume qui devait bien peser entre 60 et 80 kilos me mis moi aussi la puce à l’oreille, mais bon, les gens forts, cela existe. C’est lui qui se décida le premier. Il m’invita au États-Unis pour soi-disant son anniversaire. Nous étions en réalité seuls, et il m’exposa le résultat des recherches qu’il avait effectuées sur moi. Il existait un Martial Massu, né le même jour dans la même maternité qui habitait Brest et qui ne me ressemblait pas, mais alors pas du tout... En outre, j’était capable d’exploits physiques d’après lui hors des limites humaines. Il m’avoua que pour sa part, il était âgé de plus de 240 ans, et que mes nouveaux amis s’était effectivement rencontré à l’opéra... en 1789, peu avant la révolution française. Je lâchait que je n’était en France que depuis deux ans et que j’avais vécu toute mon enfance dans une contrée reculée, que je situais vaguement en Indonésie.

    Les choses en restèrent là jusqu’au 31 octobre 1988 où nous nous retrouvâmes tous, déguisés, pour fêter ensemble la nuit d’Halloween à New York. Hayora avait un authentique équipement de samouraï, Jean et Judith étaient en Harlequin et Colombine, Andrew en costume écossais. Je n’avais pour ma part fait qu’arborer mes couleurs : écharpe de soie blanche, veste Or, pantalon et chemise rouges sang. Tous ce passa comme une classique nuit d’Halloween jusqu’à environ onze heures du soir lorsque nous entendîmes un cri, probablement féminin, et qui ne semblait pas « cadrer » avec l’ambiance de l’endroit. En nous rapprochant, tout au bout d’une ruelle que n’aurait pas dédaigné un chef décorateur de polar glauque, nous vîmes une forme féminine, blonde, entouré de 8 formes voûtées, menaçantes, que nous devinions déjà assez baraquées sous leurs longs macintoshs. D’un commun accord, nous décidâmes d’intervenir, et pendant que Jean, Hayora et Andrew avançait dans la ruelle, Judith frappait à la porte du grand bâtiment qui longeait sur la gauche la ruelle. Moi-même, après un appel infructueux à la police, décidait d’agir et empruntait avec un peu de muscle la plus proche voiture garée. Lorsque j’arrivait dans la ruelle avec la Ford, le combat s’était déjà engagé, et plutôt en défaveur de mes amis. En effet les silhouettes, qui nous le sûmes plus tard abritaient des espèces de monstres croisement vague d’un homme et d’une grenouille, étaient vigoureuses, et même le brillant combattant qu’est Hayora était embarrassé par leur nombre et leur habileté. Je ne distinguait alors que furtivement l’ombre de Judith, perchée sur le toit surplombant le cul-de-sac ( la Licorne seule sait comment elle avait fait pour arriver jusque là ! ) et tentant de remonter la blonde au bout de draps noués, pendant que mes trois compères détournaient l’attention des agresseurs. La ruelle excédait par sa largeur celle de ma nouvelle automobile d’un petit mètre, je décidai donc d’accélérer autant faire se peut afin d’enfoncer les lignes adverses (et sûr que les trois zigotos auraient le réflexe de se coller au mur). Mon plan réussi à merveille, sauf lorsque Jean trouva « fun » de sauter sur le capot de la voiture pour y faire du surf. Malgré cet épisode, mon action permit de sonner la majorité des créatures et nous pûmes ensuite les « finir ». La jeune fille, quelque peu ébranlée, se présenta sous le nom de Samantha Merliane, et nous remercia. Mais elle ne parvint pas à détacher son esprit du vol plané qu’avait effectué une grosse poubelle de cent kilo sous l’impulsion de Jean. Alors que nous déguerpissions les lieux vers un petit bar connu de Hayora, elle ne cessa de nous interroger sur l’incident. Arrivé dans le bar, je prétextait une envie pressante pour joindre Martin avec son atout. La découverte des monstruosités me rappelant Rilya m’avait plus alarmé que celui-ci, qui me conseilla simplement de prendre garde et de le recontacter si besoin urgent était.

    Dans le petit bar, puis chez Jean, qui nous avait invité, « Samantha » continua ses questions, en restant très évasive sur elle-même, et en nous montrant des cartes froides au toucher, que je reconnu être des atouts. Elle s’en servit pour tester notre sensibilité psychique, et détecta même celui de Martin qui était dans ma poche. Elle en prit un dans son paquet qui lui était identique, et prétendit en être l’auteur. Nous sentions une atmosphère de plus en plus étrange et envoûtante envahir la soirée. Elle avait commencé par se focaliser sur Jean, puis nous y passâmes tous plus ou moins. Pour finir, elle se retourna, il nous sembla entendre des soupirs d’effort, des craquements du tissu, et ce fut un homme, qui se tourna vers nous, en disant s’appeler en vérité Merlin. Grâce à ce qu’il appela le « logrus », il trouva en Ombre des vêtements masculins propres, et m’en procura même sur ma demande, sans le moindre effort. Il nous parla alors d’Ambre, de ses princes, de la marelle, et nous dit supposer que mes amis étaient les fils des princes partis chercher un des leur, Corwin (celui dont je devait apprendre quelques jours plus tard qu’il était mon père) autour de cette terre qui pour eux n’était qu’une ombre.

    Après cette grande discussion, Merlin nous proposa de faire un tour en Ombre. Il était en effet en mission pour Random, le roi d’Ambre nous dit-il , et avait été surpris par ces créatures mais ne pouvait pas trop retarder son périple. Il nous emmena donc en Ombre jusqu’à une clairière au centre de laquelle il creusa et trouva rapidement un petit anneau d’or surmonté d’un rubis. Quelques instants auparavant, malheureusement, une demi-douzaine de créatures étaient apparues aux bordures de la clairière. Nous commençâmes à combattre mais, alors qu’elles avaient le dessous, Jean, puis Hayora puis Andrew tombèrent, comme dans le coma. Il ne restait plus que celui qui était visiblement le chef des « crapauds-pas-beaux ». Merlin se tendit vers lui et nous pressentîmes que devait se dérouler un terrible duel mental. D’autant plus terrible que, visiblement, Merlin peinait à contenir les assauts invisibles de son adversaire. Je pris donc le katana de Hayora et, après m’être approché du « chef » par un délicat mouvement tournant, je lui sectionnait les genoux. Sur le conseil de Merlin, libéré du combat mental, je l’achevai alors sans douleur  ni remords. Nous réveillâmes les autres et de peur que d’autres créatures n’arrivent, Merlin décida de rentrer le plus rapidement possible en Ambre : il tira de son étui l’atout de Gérard et nous transporta auprès de  lui, dans le navire amiral de la flotte d’Ambre, à quelques encablures du port. Puis, nous laissant à la charge de Gérard, il se rendit auprès de Random par un second atout. Ainsi se finit cette rude journée ou j’eus l’une des expériences les plus émouvantes de ma courte vie : découvrir la cité éternelle, le Kolvir, le château, le bleu lumineux et pourtant si profond, si riche, si sucré pourrait-on dire, du ciel d’Ambre.

    Dix ans maintenant se sont écoulés sur l’ombre Terre. Quatre ans en Ambre seulement. Ces années furent bien remplies : j’avais beaucoup à apprendre, entre Ambre, la famille, Rebma, ma mère, mon frère Merlin. Les rites de la cour, les environs d’Ambre, je les ai vites assimilés (enfin, je crois !), sans doute grâce à mes voyages de jeunesse. La Marelle, ah, la Grande Marelle que j’ai bien sûr passé à Rebma, sous l’oeil attentif et fier de Mère, et soutenu par les conseils de Dworkin. Je n’oublierai jamais ce jour terrible et si beau, si jubilatoire, lorsque l’on est au centre, après le dernier pas. Je lui ai demandé de me transporter au centre de la Grande Marelle d’Ambre. Une fois au centre de celle-ci, je souhaitai de même être amené au centre de la Marelle de Tir-na nog’th. Malheureusement, des nuages cachaient la lune, et sans l’atout de Martin que j’avais conservé, je serais probablement mort à l’heure qu’il est. De Dworkin, ce vieux bougon, j’appris ce pourquoi j’était fait, sans que je le sache, depuis toujours : dessiner des atouts. Il m’apprit la méthode traditionnelle, bien sûr, mais après mes premiers croquis, j’essayait aussitôt de les faire miens, et à mon image, avec au dos mes armes de toujours. Cela réussit, et c’est maintenant plus que jamais ma marque distinctive. J’en profitait aussitôt pour croquer tous les membres de la seconde génération, plus quelques motifs personnels. L’élaboration de ceux-ci ne sera d’ailleurs achevée que bientôt, avec le portail du palais de Bénédict, Ambassadeur d’Ambre aux cours du Chaos. Mais durant toutes ces années, j’ai aussi fait de fréquents détours par Ombre, souvent dans des ombres assez rapides, afin de travailler le « glissement » provoqué par la Marelle et ainsi pouvoir découvrir de nouveaux peuples, de nouvelles cultures. A l’occasion, j’ai dessiné un atout, ou récupéré un objet d’artisanat local, toujours frappé à mes armes sur ma commande, et qui renferment pour certains de surprenants pouvoirs... Pour résumer, je dirais que j’ai passé deux ans et demi en Ambre, dont bien deux ans à suivre les cours de Dworkin, un an et le pouce à Rebma, à chercher à connaître cette mère qui, en raison de quelque obscure menace, m’a envoyé loin d’elle durant toutes mes années d’enfance et d’adolescence. Lui pardonnerai-je un jour, je ne sais. Martin a été un très bon tuteur pour moi, bien que parfois un peu dépassé. Être son oncle est quelque chose que j’ai encore du mal à assimiler. Mais ce manque, ce déchirement que je ressens aujourd’hui, Mère, par ses attentions, ses confidences, sa protection, ne peut le combler. Il devait exister d’autre moyens. Peut-être suis-je injuste, elle a tellement souffert, elle aussi. Mais la Marelle dans mon sang, et mes cartes, aux bouts des doigts, voilà qui nous éloigne encore plus. Elle me rêve Dauphin, alors que je ne suis que voyageur. Ombre possède une musique envoûtante qui vous attire et auquel je succombe à tous coups. Que j’aimerai voir Corwin mon père, pour le connaître, jouer, marcher, me battre même, à ses cotés !
 Mais je doit bien un jour ou l’autre en finir avec les années passées, et dire que j’ai passé  en tout presque un an d’Ambre à courir Ombre, et que pour moi, cela a bien duré... disons 4 ans. J’ai donc alors que j’écris ses lignes trente-deux ans effectifs, soit, aux aberrations d’Ombre près, Onze Mille Sept Cents aubes et autant de crépuscules.

 Le 9/10/1997
11714ème aube

    Nous étions en Ambre ce jour-là, Guénelorn et moi. Judith et Hayora étaient partis, nous avions promis à notre oncle Bénédict de lui rendre visite aux Cours, où il est ambassadeur d’Ambre. Nous décidâmes donc de partir vers le chaos, et comme nous nous sentions assez en train, nous descendîmes vers le port afin de faire la promenade en Ombre à bord du BlueWing. J’avais fait faire ce voilier dans un chantier naval d’Ombre réputé (et conseillé par Gérard) pour qu’il puisse affronter divers types de réalités. Il faisait une dizaine de mètres et les deux compartiments intérieurs étaient assez spacieux pour six hommes d’équipage. A trois, en comptant Démon, le grand loup blanc de Guénelorn, nous devions donc être comme des pachas. Quoique « comme des princes d’Ambre » serait sûrement plus judicieux.

    Alors que nous en étions aux préparatifs d’appareillages, une inquiétude nous assaillit. Nous nous sentions oppressés, comme suivis, presque empêchés de respirer parfois. Démon, qui possède un sixième sens très développé, craignait visiblement quelque chose, et il grogna plusieurs fois durant le voyage. Cela s’apaisa finalement et nous pûmes voguer à notre guise, tour à tour à la barre et à la marche en Ombre. En quelques jours, nous arrivâmes en vue des côtes d’Orêve. Cette ombre était habitée par des indigènes accueillants, ne connaissant pas la guerre, vivant de pêche et de fruits que l’île leur fournissait en abondance et avec une grande diversité. L’artisanat du bois et du cuir étaient développés, comme nous eûmes l’occasion de l’apprendre durant les quelques jours qui suivirent. Il s’agissait en réalité (s’il on peut dire...) d’une grande île volcanique (à l’épanchement régulier des laves), avec de nombreux récifs autour, sauf pour ce qui concernait le chenal par lequel nous étions arrivé et les grandes plages de sables fin, idéales pour le surf. Le village principal, troglodyte, était situé dans un cirque naturel, dont un piton rocheux d’environ soixante mètres de haut marquait le centre. Le port constitué dans le bassin communiquait avec l’océan par une brèche sinueuse dans la haute falaise de granit visible du large. L’endroit était vraiment charmant, correspondant tout à fait à nos volonté. Je passait deux ou trois jours à visiter et à préparer un atout de la falaise surplombant le village, afin de pouvoir y revenir sans effort supplémentaires. Et comme je ne voulais pas risquer le BlueWing sur les rivages chaotiques, nous le laissâmes à la garde des indigènes et  nous appelâmes notre oncle.

    Celui-ci nous répondit presque aussitôt. Il était dans une salle d’armes, et ferraillait avec quelqu’un à sa droite. Tout en liquidant son combat rapidement, il nous invita et nous fit passer. Là, il nous présenta son adversaire, un de nos cousins, Lohengrim, qu’une Dame des Cours avait mis au monde après la visite de notre oncle lors de la signature du traité marquant la fin de la guerre dite de la Marelle. Durant la fin du cycle qui rythme la vie aux Cours, nous mangeâmes et nous eurent une longue discussion avec Lohengrim et Bénédict (si, si, c’est possible ! ). Lohengrim nous parla en particulier du Logrus et de son initiation. Ainsi nous pûmes découvrir l’étrange similitude qui existe entre les deux pouvoirs dit fondateurs et antagonistes (quoique que Merlin maîtrise les deux et semble ne pas s’en porter plus mal... ). Un parcours, dans les deux cas. Une adaptation perpétuelle au Chaos dans un cas, pour pénétrer dans une matrice tridimensionnelle. Un acte avant tout volontaire et mental pour la Marelle, qui repousse notre corps et que nous ne pouvons franchir qu’au prix de la plus extrême ténacité psychique. Lohengrim utilisait également couramment les atouts, mais ne savait pas personnellement en dessiner. C’est peut-être cette discussion qui, durant la « nuit » qui suivit, me fit découvrir l’origine de cette inquiétude et sensation d’oppression qui revenait périodiquement nous troubler, Guénelorn et moi. J’était (et suis toujours) persuadé que celle-ci était liée aux atouts, et à leurs manipulation. Mais je n’arrivait pas à l’époque à formaliser de façon plus précise mes soupçons. Le lendemain, je joignais Gérard pour m’assurer que tout allait bien en Ambre, qu’aucune menace ne se profilait à l’horizon. La réponse avait le mérite d’être claire : RAS.

    La veille, mon oncle nous avait annoncé qu’une grande compétition d’escrime allait se dérouler dans les Cours. Guénelorn et Lohengrim préférèrent ne pas y participer, mais j’étais intéressé par le défi et, à vrai dire, surtout pour « tâter » du chaosien. Je passait donc mon second cycle dans les Cours moitié ferraillant pour me mettre dans l’ambiance du tournoi, moitié prenant des notes et des croquis pour les atouts de Lohengrim et du magnifique portail du palais de notre oncle. Le lendemain, c’était le grand jour. Bénédict avait été prié d’arbitrer la compétition. Je fut abordé peu avant le tournoi par un jeune seigneur du chaos. Il se présenta à moi sous le nom de Sigfried, et disait être content de rencontrer un prince d’Ambre. Le tournoi commençait, nous nous séparâmes. Il fut mon second adversaire. Malgré la science que je développait alors, il vint à bout de moi relativement rapidement. Lui-même fut éliminé un peu plus tard, au début de la poule suivante. Il connaissait Lohengrim et nous proposa une visite des Cours, tout en insistant sur sa volonté de faire un tour en Ombre ou en Ambre avec nous. La fin du tournoi n’eut pas énormément d’intérêt pour de pauvres petits bretteurs comme nous. En revanche nous ressentîmes une très forte tension, oppression devrais-je dire, à ce moment et sans que nous puissions déterminer son origine précise.

    Les cycles suivants, je terminais l’atout de mon cousin, visitais les abords du palais de mon oncle, et pour finir, avant de quitter ces lieux, Guénelorn et moi-même décidâmes de « visiter » l’abysse ainsi que les lieux de la bataille qui clôtura la guerre de la Marelle. Là, nous contactâmes Sigfried et, pour continuer le voyage par mer (je ne voulais pas abandonner le BlueWing trop longtemps), nous passâmes à Orêve par l’atout que j’avais confectionné.  Là, après démonstration des pouvoirs de métamorphes de Lohengrim et Sigfried (très pratique pour nager !!) et un peu de surf, nous passâmes en Ombre pour aller faire la fête sur l’ombre Terre, vers la maison familiale de Guénelorn située près de Bordeaux, en France.

    Après avoir accosté sur les terres de celui qui était toujours connu là-bas sous le nom de Jean d’Abalam, nous décidâmes d’aller faire une virée au bassin d’Arcachon tout proche. Nous laissâmes la voiture sur la promenade afin de marcher un peu et de se mettre les pieds dans l’eau. Il était dix ou onze heures du soir, les lumières de la ville éclairaient faiblement le bassin. Lohengrim et Sigfried allèrent piquer une tête dans l’eau, lorsque que nous eûmes de nouveau un sentiment aigu de danger. J’évoquai la Marelle mais je ne voulais pas alors prendre le temps de la parcourir en esprit et cela ne m’apprit rien. Nous étions sur nos gardes, sur la plage, prêt à réagir à l’imprévu, lorsque toute la ville fut plongée dans le noir. Lohengrim revînt, tout mouillé. Nous rentrâmes dans la ville, afin de rejoindre la voiture par des rues intérieures à la ville. C’est là qu’ils nous coincèrent. Ils étaient dix, des humains en apparence, cinq devants, cinq derrière, vêtus de grands impers. Comme ils étaient menaçants, nous déclenchâmes les hostilités. Ce fut Démon qui fit le gros du boulot à l’avant, Guénelorn et moi l’aidâmes un peu, et Lohengrim dû retenir les gars de derrière. Sigfried apparut ensuite et l’aida à les finir. C’est à cette occasion que j’appris que Démon, nous seulement était rapide, fort, dotés de griffes meurtrières mais aussi qu’il parlait et, plus étonnant encore, qu’il résistait assez bien même aux balles !

    Pendant ce temps, j’avais laissé les sous-fifres à Démon et Guénelorn, et me chargeais de celui qui était de toute évidence leur chef. Alors que je me dirigeais vers lui, il disparu. Je pensais à un mauvais tour que m’aurait joué la pénombre du lieu mais quelques instants plus tard, alors que je tentais de repérer un mouvement suspect, il me cueillit d’un uppercut au foie qui m’envoya valdinguer plus loin. Je me relevais rapidement mais il me frappa derechef. La seule différence avec la première fois est que je m’y attendais  et flairais une histoire de sorcellerie. Je réagis alors plus vite que lui et alors qu’il croyait que son crochet à la mâchoire allait me mettre k.o., j’utilisai la remarquable propriété de ma chaîne de corps et encaissai le coup sans broncher, ce qui me permit d’attraper son bras. Une fois le bras pris dans l’étau de ma main, je localisai son corps et frappai de toutes mes forces au niveau du ventre. Le choc vit s’évanouir son charme d’invisibilité, et j’en profitai pour placer une clé que j’avais apprise sur l’ombre Terre. Le combat était terminé. Cependant, alors que je commençai à l’amener vers les autres pour faire son interrogatoire, mon prisonnier s’amollit sous ma prise. Craignant qu’il ne se liquéfie ou quelque chose du même ordre, je brisai sa nuque pendant qu’elle offrait encore une prise solide. En réalité, je pense qu’il s’était donné la mort avant que je ne l’achève. La fouille en règle qui suivit ne nous appris pas grand chose sur nos agresseurs : ils ressemblaient vraiment à des humains, sorcellerie mis à part, plus le fait qu’ils nous avaient entraînés sans que nous nous déplacions dans une ombre soumise à leur contrôle. Le seul indice tangible, je le trouvais sur le corps du chef. Il s’agissait manifestement d’un atout. Son dos était d’un rouge sang d’une nuance légèrement plus foncée que celle que j’utilise pour mes propres atouts. Mais c’est son endroit qui nous attira : il était entièrement noir, noir comme la nuit, noir comme l’Abysse. De plus, il résista à toutes nos tentatives pour l’activer. De guerre lasse, nous reprîmes le chemin d’Ombre jusqu’à la voiture et retournâmes tous les quatre à Bordeaux chez Jean afin d’y prendre quelque repos.

 Le 13/10/1997
11730ème aube

    Le lendemain matin, je me levais tôt pour faire un croquis de ce mystérieux atout noir, ce qui devait se révéler vain par la suite. Au petit déjeuner, tout le monde y alla de sa conjecture. A l’époque, je pensait aux profondeurs de l’Abysse que nous avions vu il y avait quelques heures à peine. Mais ce pouvait aussi être une quelconque pièce sombre en Ombre, Ambre ou même aux Cours. Toujours était il qu’il donnait à nos efforts pour l’activer une fin de non-recevoir. Nous en étions là lorsque Guénelorn reçu un contact par atout qu’il nous résuma ainsi : un certain Francis Mac Quiligan, parent d’Andrew, qui réclamait notre assistance et voulait nous faire venir en Ambre. Personnellement, j’étais très suspicieux. Qu’un Francis que nous ne connaissions ni d’Eve ni d’Adam soit dans le château d’Ambre même, manipulant nos atouts pour nous faire passer afin de sauver Andrew, je trouvais cela louche. En conséquence, je décidai d’utiliser mon atout du hall d’entrée du château afin d’aller en éclaireur vérifier les dires de « Francis ». Je pensais avoir le temps de prévenir mes cousins si celui-ci n’était pas comme il le disait dans la grande bibliothèque. Je passai donc, entraînant avec moi et malgré moi Sigfried. Il s’était accroché à mon bras afin de « connaître » Ambre. Furieux de sa grossièreté, je lui signifiais sèchement son congé et il partit grâce à un atout vers les Cours, après un long regard périphérique.Je me retournais vers la porte de la bibliothèque et l’ouvrais. J’y vis un homme de taille moyenne, dans un fauteuil, qui arborait ostensiblement les couleurs du clan Campbell, le clan d’Andrew. Pierre, le soldat de garde à l’escalier qui mène aux caves confirma qu’il s’agissait d’un invité de Random. Rassuré, j’allai me servir un verre et allumai un cigare en attendant l’arrivée de mes cousins.

    Une fois tout le monde réunit, Francis se présenta comme un parent et ami d’Andrew, qui avait disparu alors qu’ils voyageaient dans une ombre baptisée Orcani, proche de l’antique ombre de mon père, Avalon. Il nous dit qu’Andrew lui avait apprit à se servir des atouts et lui avait parlé de Guénelorn et de moi comme des gens de valeur, qui pourraient l’aider en cas de besoin. Nous acceptâmes, mais comme rien ne pressait vraiment, et que Random n’était pas disponible avant le début de l’après-midi, Guénelorn décida de faire visiter le port à Lohengrim et Francis. Il partirent donc déjeuner en ville pendant que je me rendai aux cuisines, pillai celle-ci et me réfugiai dans ma chambre. Là, tout en me restaurant, je déballai les matériaux nécessaires à la confection d’un atout. Je voulais en effet créer une copie factice de l’atout noir afin de pouvoir donner le change si quelqu’un s’avisait de vouloir le récupérer par la force ou le chantage.

    Je venais de terminer le dos de la carte lorsque, engourdi par le travail, je me levai et allai à la fenêtre. Là, un mouvement attira mon regard du coté du Kolvir. C’était une petite tache blanche, mais lorsque je regardai mieux, je reconnu distinctement la Licorne, notre patronne (et, si les rumeurs sont exactes, mon arrière grand-mère...), portant comme un collier de couleur noire. De ma place, je n’arrivai pas à percevoir plus de détails. J’étais interdit, sûrement bouche bée appuyé sur ma fenêtre (on est toujours un peu ridicule dans ces cas là, mais l’émotion que l’on ressent alors est telle que le monde pourrait s’écrouler autour de nous que nous ne nous en apercevrions pas...). J’ai eu alors la nette impression qu’après s’être retournée pour regarder dans ma direction, elle fila vers le bosquet qui porte son nom. Le charme rompu, je restai quelques instants songeur, puis je m’habillai et sortai l’atout que j’avais fait il y a plusieurs années de cela de la source qui coule sur le coté de ce fameux bosquet. Je passai et me retrouvai sur une épaisse couche de mousse tendre. Je fis quelques pas et découvris qu’elle était là, à quelques mètres à peine de moi. Sur le moment, je ne me demandai même pas comment elle avait pu faire pour parcourir en quelques instants un si long chemin: je restai tout simplement ébloui par tant de grâce et de beauté. Après quelques battements de coeur qui me parurent durer une éternité, elle releva lentement sa tête et me regarda. Il me sembla que son regard d’émeraude me mettait à nu, comme si elle savait et avait toujours su tout de moi, plus que ce que j’en savais moi-même. Curieusement, cela ne me fut pas désagréable. Au contraire, j’avais le sentiment d’être totalement compris, « gnocqué » comme dirait un écrivain de l’ombre Terre dont j’ai oublié le nom. Je la saluai humblement et tentai un pas. Comme elle ne réagissait pas, je recommençai et arrivai bientôt près d’elle, le coeur battant, les mains certainement un peu moites. Durant mon approche, j’avais les yeux fixés sur le  « collier » que je voyais alors de près. C’était un morceau d’étoffe noire, sans doute un foulard, noué autour de son cou. Mais ce qui attira mon attention plus que tout, ce fut la rose brodée en fils d’argent que je voyais sur le foulard. Une rose d’argent sur fond noir, le symbole de mon père, disparu depuis la guerre et que je n’avais jamais rencontré ! La Licorne se pencha en avant, comme pour se débarrasser de ce tissu, ou pour me le donner. Je m’enhardis et le dénouai lentement, en prenant garde à ne pas l’effaroucher. Attitude bien présomptueuse, maintenant que j’y pense, car il est certain qu’elle n’a pas grand chose à craindre de quelqu’un comme moi. Le foulard dans ma main, je le défroissai sur ma cuisse. Lorsque je relevai les yeux, la Licorne partait, comme un devoir accompli. Je revînt sur mes pas, tentant de profiter de ces instants merveilleux qui s’enfuyaient. J’ai bien dû rester quelques deux heures à rêver, allongé sur le tapis moelleux de mousses qui borde la source. J’étais calme, comme si je venais de faire l’amour, et je repoussais un ou deux contact d’atout, sans effort, et sans même y penser, juste pour préserver cette délicieuse sensation.

    Enfin, je résolu de rentrer au palais. Je sortai l’atout de Guénelorn et le priai de  me ramener. En remettant l’atout dans son étui, je vis mes armes peintes au dos de l’atout, et fus saisi par ma vanité : même Dworkin mon vénérable aïeul avait rendu hommage à la Licorne dans ses atouts. Qui étais-je donc pour remplacer son image par mes armes, qui me semblèrent alors vaines et prétentieuses ? Je résolu de faire désormais mes atouts avec au dos ma vision de la Licorne et non plus ces armes qui me faisaient presque horreur. Bref, Guénelorn me ramena au château, et je passai chez moi pour m’habiller en vue d’un long voyage en Ombre, vu qu’il n’existait pas d’atout pour Andrew. Puis je redescendis avec Guénelorn pour annoncer à Random mon départ. Ayant pris vivres et chevaux, nous partîmes vers le sud, à travers la forêt d’Arden. Après quelques heures de chevauchée, Francis stoppa, et évoqua le Logrus. Grâce à lui, il nous fît passer directement non loin de Lokrus, la capitale d’Orcani, ombre qui évoqua en moi la Cornouaille du XIIème ou XIIIème siècle de l’ombre Terre. Nous arrivâmes en hiver, dans une petite grotte. Nous nous présentâmes bientôt aux portes de la citadelle, qui étaient fermées, la nuit tombant à notre arrivée. Là, l’hospitalité nous fut sèchement refusée, « ordre du Roi Corwin ». A la fois dépités et intrigués par ce nom proclamé de Corwin, nous fîmes de la grotte un abri pour mettre au point un plan d’attaque. Francis dit pouvoir entrer seul dans la ville par un passage secret. Afin de pouvoir le rejoindre une fois entré, je commençai un croquis de Francis. Une tempête de neige se levait et, après une bourrasque particulièrement violente qui nous aveugla tous, nous constatâmes que Francis avait disparu. Guénelorn, Démon et moi-même partîmes alors dans le blizzard guidé par Démon pour le retrouver. nous ne découvrîmes point de Francis mais un vieillard sobrement vêtu aux doigts et aux yeux crochus qui nous déclara « Je le tuerai, vous m’entendez, je le tuerai ce roi félon de Corwin... ». Lorsque nous retournâmes à la grotte, Lohengrim avait réussi à joindre Andrew par son atout qu’avait retrouvé leur père commun j’ai nommé mon oncle Bénédict. Presqu’ aussitôt, alors qu’Andrew se réchauffait et nous contait ses problèmes, il reçu un contact d’atout. Je m’immisçai dans la conversation, car je ne voulais pas qu’il arrive quelque chose à Andrew par l’intermédiaire de l’atout nous laissant en plan sans aucun autre renseignements. Le contact venait de Random qui renonça à parler à mon cousin lorsqu’il apprit que nous étions plusieurs autour de lui. La conversation devait être non-urgente et d’ordre privée car il coupa rapidement le contact.

    Nous pûmes enfin nous asseoir tranquillement et reprendre la conversation engagée. Il y avait quelques semaines au plus, un homme de forte carrure et se faisant appeler Corwin avait pénétré dans le palais, occis le roi et quelques-uns des membres de sa garde et pris le trône. Sa force était devenue rapidement proverbiale et nul n’avait osé le défier. Andrew, qui était un des principaux vassaux de l’ancien roi, avait dû se réfugier dans la clandestinité pour éviter de se faire arrêter.  Il avait demandé notre aide car qu’il s’agisse du véritable Corwin (mon père !!!), d’une de ses ombres ou d’un autre phénomène encore, cela concernait Ambre d’une certaine façon. Nous décidâmes de rentrer dans la ville grâce aux forces du Logrus maîtrisées par Lohengrim et Andrew, d’y trouver une bonne taverne et de tenter de faire parler les gens, bref, de nous renseigner sur cet usurpateur. Démon ne faisant pas très couleur locale, Guénelorn le laissa dehors et nous entrâmes dans une auberge. Quelques temps plus tard, alors que les langues commençaient à se délier, une troupe imposante arriva dans la salle et procéda à notre arrestation. Nous aurions pu faire le coup de poing mais, outre qu’ils étaient nombreux et biens armés, il nous sembla inutile de risquer un mauvais coup pour faire ce qui était somme toute notre but, rencontrer « Corwin ».

    L’audience, si l’on peut dire, se déroula au château, dans la grande salle du trône. Une dizaine de gardes étaient là. Lorsque le nouveau maître des lieux arriva, nous fûmes tous frappés par sa ressemblance avec le Corwin que Dworkin avait peint sur nos atouts. Il vînt vers nous, nous observa, s’approcha de moi, passa derrière moi... et me donna un violent coup de poing au creux des reins. Je tombai à terre, surpris, sans trop de mal, ne sachant pas encore à quoi (ou à qui) je devais ma survie : à la « douceur » donnée à son coup, à sa force finalement moyenne au vu des critères familiaux ou au charme protecteur de ma chaîne. Je me relevai promptement, prêt à frapper, sûr de ne pas pouvoir faire grand mal à mon véritable père. Après plusieurs assauts, je trouvais une ouverture et lâchait toute ma force (et celle de mon anneau d’argent) dans un uppercut à l’estomac. Quelle ne fut pas ma surprise (et, dans une certaine part, mon soulagement) de voir mon poing s’enfoncer dans son torse et presque le traverser, brisant la colonne vertébrale avec d’autres viscères sous l’impact. Je fus bel et bien recouvert par le sang de mon adversaire mais le doute n’était plus permis : c’était bien une ombre de Corwin, certes très forte pour des habitants d’ombre mais loin de celle d’un véritable Prince d’Ambre, et de mon père (qui n’a jamais passé pour une mauviette) en particulier.

    Immédiatement après la mort de l’usurpateur, Andrew reprit le contrôle du palais. Notre combat avait de beaucoup convaincu la soldatesque du lieu qu’il ne fallait trop nous chercher et Andrew était bien connu comme le chef du clan Campbell. Il fit revenir au palais l’héritier de l’ancien souverain, caché par son clan. Il organisa rapidement une régence, libéra un grand nombre de prisonniers arrêtés sur l’ordre de « Corwin », bref, fit le ménage en son ombre. Durant les quelques jours nécessaires à ce nettoyage, nous fûmes les invités d’Andrew et de tout l’Orcani. Je finis calmement la copie factice de l’atout noir, et exécutai un atout d’Andrew (avec au dos une licorne sur fond herbeux regardant vers la dextre). A sa demande, je renonçai à en effectuer des copies selon mon habitude. Il ne désirait pas qu’il existe trop d’atout de lui, et les huit que nous avions comptés être en circulation (celui fait par Guénelorn compris) lui semblaient déjà être de trop. Les autres explorèrent un peu la région de Lokrus. Pour ma part, je ne pouvais détacher véritablement mon esprit de l’ombre de mon père. Corwin avait jadis régné dans une ombre fort proche d’Orcani appelée Avalon, qu’il avait dit détruite. Mais l’ombre de lui que j’avais tuée était apparue il y a peu. Cela pouvait signifier que mon père vivait, et qu’il était resté récemment assez longtemps dans cette portion d’Ombre. Je devais partir à sa recherche.  La route pouvant être longue, je décidai de me munir auparavant d’une solide monture. Je la cherchais en Ombre depuis plus de cinq jours lorsque mon chemin croisa celui d’une harde de belle allure. L’étalon qui la menait avait une robe safran , une petite étoile blanche sur le front et était bien découplé. Je devinais qu’il s’appelait Atour. Alors qu’il veillait sur le troupeau qui buvait à un point d’eau, je m’approchais lentement de lui, lui parlais, fis ami-ami. Quelques minutes plus tard, nous nous étions mutuellement jaugés et je tentais de le monter. Je passe sur les détails. Après quelques temps, nous nous entendions parfaitement, et je lui faisais quitter sa harde, lui promettant des paysage inconnus, ce qui parut lui plaire. Plus tard, je trouvais une selle conçue exprès pour lui, d’un beau cuir rouge, frappée de mes armes de chaque coté du pommeau. Alors que je retournais vers Orcani, j’acquis la certitude qu’il était rapide et endurant, plus que tous les chevaux que j’avais monté jusqu’à présent, et conforme à mes désirs. J’étais certain que nous ferions un long chemin ensemble.

Le 14/11/1997
11738ème aube

    Une fois de retour en Orcani, j’appris que Lohengrim et Guénelorn étaient retournés en Ambre. Désirant faire connaissance avec mon cousin, je l’invitais à la recherche en Ombre que j’allais faire. Andrew accepta avec plaisir et nous chevauchâmes plusieurs semaines. Nous allions d’une ombre à l’autre, cherchant des rumeurs sur des ombres de mon père, sur le nom de Corwin, sur de nouveaux souverains. Nous utilisions alternativement la Marelle et le Logrus pour orienter notre route. Atour apprit à accepter la présence du Logrus et les glissements provoqués par la Marelle. Après presque trois semaines d’errances, nous avions visités plusieurs royaumes. A chaque fois, plusieurs détails ne collaient pas, nous n’étions pas en présence de mon père, mais d’une de ces ombres plus ou moins déformée. Cependant, cela nous encourageait à poursuivre, car il était évident que pour projeter tant d’ombres, Corwin devait être resté longtemps dans les parages. Enfin, nous trouvâmes un royaume d’Avalon dirigé par un roi nommé Arthur dont le drapeau était... une rose d’argent sur un fond noir.  Le peuple l’aimait bien, même si on disait qu’il avait à son service un puissant sorcier qui inspirait la crainte. Nous demandâmes audience.Son épée était célèbre dans la région, il s’agissait d’une lame courbe en argent orné d’un damasquinage compliqué. Son approche par un filament du Logrus envoya Andrew dans les pommes quelques minutes. Ce n’était peut-être pas le véritable Corwin mais c’était certainement la véritable Grayswandir. Enfin, l’entrevue arriva. Je m’étais paré de mes couleurs, j’avais mis le foulard de la Licorne autour de mon cou. Lorsqu’il arriva, nos regards se croisèrent longuement, cherchant un indice secret de l’existence de l’autre. Il nous salua, fis sortir les gardes, puis me demanda d’où me venait le foulard. Je lui répondis, le souffle court, que c’était ma patronne qui me l’avait remis. Alors, les yeux brillants, il demanda :  «  Votre patronne... vous voulez parler de votre arrière grand-mère ?  » et je sus qu’il était mon père.

    Durant deux nuits épanouies par un ciel blanc d’étoiles, Corwin me raconta son ombre Terre et les évènements qui suivirent son exil là-bas, la terrible guerre de la Marelle. J’ai compris qu’il avait fait à Merlin (mon frère cadet, encore un paradoxe temporel déconcertant !) immédiatement après la mort de Brand, un récit semblable. Et, bien que je l’en pressais, il ne s’appesenti pas plus qu’auprès de mon frère sur l’histoire de Grayswandir, son superbe sabre d’argent qui contient un morceau de la Marelle. Mais, à la vérité, nous abordâmes durant les soirées ou les repas que je passais en Avalon de très nombreux sujets. Je vais essayer d’en restituer ici l’esprit, allant par touches successives :
 Moire :  « tu sais, je n’ai pas beaucoup connu ta mère. La fois où je l’ai rencontrée, ce fut suffisamment agréable pour que tu existe... mais autrement, je ne peux pas dire que je me sente lié à elle, désolé fiston... »
 Le foulard de la Licorne :  «  J’ai attaché ce foulard au cou d’une Licorne que j’ai rencontré en Ombre, il y a quelques temps de cela, après ma visite des cours. Je n’étais pas certain qu’il s’agisse bien de  La Licorne, notre patronne. J’avais pourtant l’espoir qu’elle aille jusqu’en Ambre. Là, je l’aurais retrouvé au bosquet de la Licorne et repris ce foulard. J’aurais ainsi pu avoir la certitude qu’il s’agissait bien de la Licorne que nous prions. » Ce foulard, aujourd’hui encore, je le porte, soit au poignet, soit au cou, soit en pochette. Il est, avec l’atout qu’il m’a confié, le seul lien tangible que je possède avec mon père.
 L’abysse :  «  méfie toi des a priori mon fils, l’Abysse est peut-être bien la seule chose vraiment réelle de l’univers... »
 Ygg, le rameau planté au bord de sa Marelle : « Je n’ai pas revu Ygg depuis cette douloureuse chevauchée d’enfer. (En ce moment, j’en était certain, mon père pensait à ma tante Deirdre, disparue avec Brand dans l’Abysse.) Quand à « ma » Marelle , comme tu dis, je n’y suis pas encore retourné, mais je pense qu’elle est ou qu’elle sera rongée, absorbée, vampirisée par la Marelle primordiale d’Ambre. J’ai tant de chose à faire ici et ailleurs... » (Cela, je ne pu le croire. Je reste intimement persuadé qu’à ce moment mon père m’a dissimulé d’autres faits ou d’autres connaissances, peut-être pour mon bien, mais dissimulé quand même...)
 Le pouvoir : « Qu’entends-tu par là, Martial ? Ah, la couronne, pourquoi Avalon plutôt qu’Ambre ? Vois-tu mon fils, être roi donne des droits et impose des devoirs. Même un  tyran a des obligations auxquelles il doit se soumettre. Et si tu veux régner et apporter la paix dans ton royaume, que tes sujets t’honorent plutôt que de te craindre, tu te dois d’agir pour eux, et non pour toi. Dans tous les cas, un roi est redevable à ses sujets. Plus le royaume est grand, plus tu es redevable. Ambre est le centre de l’univers... Random a du pain sur planche, crois-moi. Ici, je peux vivre pour moi et pour mes sujets, sans que l’une de ces deux aspirations n’empiète sur l’autre. De plus, une erreur de gouvernement en Avalon n’a que peu de répercutions. Ton oncle a sur les épaules le poids du destin de nombreuses ombres qui dépendent étroitement d’Ambre. Le pouvoir Martial, c’est comme un grain de cassis géant : la peau empêche qu’on y voit à l’intérieur, et lorsqu’il tombe, tu peux te repaître de son suc, à la seule condition qu’il ne t’ai pas écrasé dans sa chute. Et même alors, si tu en mange trop, cela peux de donner des maux d’estomac. Mais j’adore la saveur acide du cassis, pas toi ?

 L’art :
 Guenièvre :
 D’autres enfants ? non
 Dara ...

Lorsque je lui racontais les derniers voyages que j’avais effectués, j’en vîns au combat dans une ombre d’ Arcachon et à l’atout noir. Je lui présentais alors cet atout que j’avais gardé par devers moi, l’avertissant que nous n’avions pu obtenir le contact. Mon père le prit, l’observa quelques instants et, grâce au phénomène d’arc-en-ciel qui accompagne l’utilisation des atouts, je sus qu’il avait aisément réussi là où ensemble nous avions échoué. Nous observions « l’autre coté » depuis quelques secondes lorsque Corwin me fit un signe de tête :
- Tu veux aller faire un tour ?
- Pourquoi pas, répondis-je, si tu pense n’avoir aucune difficulté pour revenir... »
Ainsi fut fait, après qu’il eu ceint Grayswandir. Il passa d’abord, et je suivis. Nous nous retrouvâmes comme en état d’apesanteur, flottant dans un décor cosmique, l’obscurité qui nous entourait étant constellé de petites étoiles. La seule différence d’avec l’espace était que nous étions oppressé, comme si en réalité nous nous trouvions à plusieurs dizaines de mètres de profondeur sous l’eau. J’ai rapidement ressentit le début d’un vertige des profondeurs quand Père m’enleva d’un sort une partie de la pression qui m’étouffait. Soudain, une « étoile » sembla briller davantage puis grossir puis finalement s’ouvrir comme une fenêtre logicielle. Quelques instants plus tard, une autre fenêtre s’ouvrit. Dans la première, nous pouvions voir Gérard utilisant un atout pour communiquer à Random, bien visible dans la seconde fenêtre, les résultats d’une manoeuvre de la flotte. Lorsque la discussion fut achevée, les « fenêtres » se refermèrent, et tout redevînt comme précédemment. Nous sommes revenus en Avalon, moi effrayé par les conséquences de ce que j’avais vu, Père songeur, comme si cela n’était pas entièrement nouveau pour lui. Il mit rapidement fin à la discussion naissante par un « Et pour clore le débat sur ce sujet... », me demanda de garder cette information secrète pour le moment (lui même aviserait Random en temps et en heure) et s’enquit de savoir si je ne voyais aucun inconvénient à lui laisser l’atout en observation quelques temps. J’acquiesçais, à la fois trop heureux de me débarrasser d’une source d’ennuis probables et désireux d’en savoir plus, d’approfondir le problème avec mon père sans en être écarté comme cela avait été le cas.
 

(30 j mini)

60 aubes
Enfin, je prenais congé de mon père et jurais en mon for intérieur de mettre à contribution son hospitalité régulièrement. Je déambulais quelques jours en Ombre avec Atour, histoire de m’éloigner d’Avalon et de rejoindre tranquillement la petite île que j’avais un jour immortalisé en atout. Malgré la rapidité que m’aurait conféré cet atout, j’avais l’expérience de l’atout noir encore en tête et j’étais peu désireux de trop utiliser d’atouts avant quelques temps. J’arrivais donc sur mon île déserte, avec une carriole et des vivres achetés en Ombre. Je travaillais trois ou quatre jours pour entasser une réserve honorable de rubis bruts, sachant qu’ils seraient considérablement allégés par la taille. Puis, avec ma carriole, que je troquais bientôt pour un 4x4 spacieux tirant un van, je repartis à travers Ombre vers un hôpital que je connaissais bien. Les responsables de l’hôpital me connaissaient bien, eux - aussi. C’était la quatrième visite que je leur faisait. Tous les quatre ans environ (temps de leur ombre), je négocie ainsi une grosse masse de rubis et leur offre les équipements les plus performants que fabrique leur ombre et qu’ils n’ont pu s’offrir. Cette fois, grâce à mes rubis, une aile entière fut construite pour accueillir et soigner les enfants malades dans des conditions plus humaines. Au début, ils furent réticents, bien sûr, et je dus ruser. Mais depuis deux fois, ils ont je crois renoncé à trop chercher et ils m’accueillent à bras ouvert. Après une semaine environ passé là-bas, je repris la route avec Atour et me dirigeai vers l’ombre Terre. Je voulais récupérer mon BlueWing et le ramener en Ambre. Heureusement, il est assez grand, et après quelques modifications, je pus faire monter Atour à bord. Ce n’étais pas le grand luxe, mais cela suffit pour rallier rapidement Ambre. Atour fut tout de même très heureux de la fin du voyage, lorsque je le conduisis aux écuries du palais et le remis aux mains expertes de Jock.

Il était temps que je rentre : la veille même de mon arrivée, Random m’avait contacté pour me presser d’assister à un événement exceptionnel, à la demande de Gérard. Après m’être changé, j’allais aux nouvelles et appris qu’Andrew avait gravement insulté mon oncle Gérard et que celui-ci avait menacé de demander le bannissement de mon cousin. Andrew se préparait à présenter à Gérard des excuses publiques, devant toute la cour d’Ambre réunie pour l’occasion. J’assistais à la « cérémonie », me demandant comment quelqu’un de sérieux comme Andrew pouvait commettre une telle faute et, une fois réalisée, ne pas l’assumer et accepter une telle humiliation publique. Lorsque mon cousin cita dans son allocution une famille importante des Cours du Chaos, je me mis à soupçonner une vieille intrigue (donc tordue), et décidai de ne pas m’en mêler de près ou de loin. En revanche, je profitai de l’occasion pour prendre des nouvelles de toute la famille ainsi assemblée. Je revoyais ainsi Fiona, Martin, Merlin, Julian, Rein, quelques nobles que j’avais connu à la cour. Llewella était là également, toujours aussi froide à mon encontre. J’avais bien sûr vu récemment Bénédict, Flora et Random. Parmi toutes les conversations qui eurent lieu alors, ce fut paradoxalement celle que Merlin me fit dans un coin de la salle du trône qui reste gravée dans ma mémoire. Ne l’avais-je pas vu durant presque trois semaines il y a peu ? Il semblait troublé. Je lui demandais ce qu’il voulait me dire de toute évidence en privé.
 « - Je reviens des Cours du Chaos, me dit-il, et j’y ai vu ma mère. »
Je savais de sa bouche que celle-ci était très impliquée dans les affaires des cours, et nourrissait de grands desseins pour son fils. En Avalon, Merlin m’avait confié qu’il commençais à trouver pesante l’attitude de sa mère à ce sujet. Il reprit :
  « - Elle n’a pas arrêté de me parler de politique, et sur un ton que je n’aime pas du tout. Elle commence même à me faire peur : je lui ai demandé à brûle-pourpoint son avis sur le destin de Père. S’il pouvait d’après elle être encore vivant, dans une ombre qu’il aurait choisi, ou voyageant comme chacun de nous. Tu ne sais pas ce qu’elle m’a répondu ? Avec un air de confiance supérieure, elle a dit  «  Rassure toi, c’est impossible... ». Bien sûr, j’ai changé de sujet, mais... »
 Flora arriva juste à ce moment, remerciant Merlin de l’attention qu’il avait eu en lui envoyant ce tableau, sur l’ombre Terre... Je m’éclipsais lâchement. Plus tard, lorsque nous pûmes à nouveau parler, ce fut pour constater que tout était dit, et que nous devions être vigilants. Je regagnais Rebma le lendemain, empruntant pour le plaisir Faiella-Bionin, le grand escalier qui mène au royaume de Mère.
 

La suite n'est que sous forme de notes éparses, qui seront sans doute assez obscures. Vous m'en voyez désolé. Un jour peut-être je tenterai de remédier à cela, surtout si la campagne reprend... (Virtualex, entend ma voix ... ). A la fin de ce texte, vous pourrez trouver quelques rushs, et la description de ses atouts et de ses artefacts.

 La destruction d'Ambre :
 excuses d’Andrew
 Gérard a pris Atour pour faire une balade.
 Descente à Rebma par Faïella-Bionin, résidence pendant une semaine.
 Retour d’Atour. Balade avec Merlin en Ombre jusqu’à Ygg.
 Discussion avec Ygg, il a bien connu Corwin, message pour Corwin (??)
  Tir d’arbalète qui traverse la protection de la chaîne.
  Appel de Random par atouts, qui me présente ses condoléances.
 Rebma,  condoléances de Llewella
 Multiples contacts d’atouts, disparition du carreau.
 Matin, Chapelle, attentat sur la route vers le cimetière.
  Un garde mort, Julian et Bleys blessés.
  Transport de Bleys dans mon Ombre hôpital.
( ? est-ce à ce moment que Guénelorn rencontre et tombe amoureux de Gwenaëlle ?)
  Llewella rapatrie Julian.
 Bleys enlevé par Fi.
 Atour, Ygg, Moire ????
 Ygg => frontière noire (?)
 conseil d’administration à 9h, .« aide » de  Llewella pour diriger le pays.
 Mort de Bleys, Dworkin blessé, trous dans la Marelle Primale.
  Est-ce le sang de Dworkin ?
  Bleys mort sur la Marelle Primale , en combattant avec ? (+ tard => Finndo).
  Activité grouillantes au Chaos.
  Le garde mort pour Random est enterré comme un prince d'Ambre.
   trou....

 Une frontière noire part du Chaos et encercle les Marelles.
 Brand possédant une Ombre d’Obéron estropie Random, brise Gérard en deux.
 Fi en combat mental avec Brand. Intervention Guénelorn, Démon, Martial.
 Gérard finit par tuer Brand qui s’échappe du corps en hurlant.
 Apparition de Corwin et de Merlin (avec deux aiguilliers, maintenant roi du Chaos). Ils semblent tous les deux capable de résoudre le Pb, finalement, Corwin crée une bulle qui arrête la progression de la vague de Chaos.
 Révélation par Corwin du plan alpha, de l’abysse.
 Ambrien survivants :  Merlin
    Corwin
    Bénédict (aux cours, bras droit de merlin)
    Random
    Fi (au début lobotomisée)
    Vialle
    Martial et Guénelorn, pas d’info sur autres PJ.

Tous sauf Bénédict et Martial apprennent à un niveau ou à un autre le pouvoir des atouts découvert par Corwin sur le plan alpha.
Martial apprend la métamorphose avec Merlin, la conjuration avec Fiona, passe la Marelle de Paris, devient expert (marelle avancée) avec Corwin et Fi.
Refonte des artefacts de Martial par conjuration et métamorphose d’objet de sang.
Démon devient très couillu. (Trop ?)

La destruction de la Marelle inversée de Finndo
 début : lignes des notes lavées par l’eau (quatre ou cinq)
 Cours : « bénédict est le bras droit de Finndo »
  Merlin attaqué par Finndo, transformé en momie (bandelettes)    ;-)
 Corwin, Fi, Random injoignables.
 Recherche d’une bulle d’ombre des Cours vers Paris.
 Voyage vers Ygg dans bulle
 cauchemar :       pendant ce temps, Guénelorn a des PB
  la poche s’effondre,     avec Finndo
  Corwin va mourir, tire-toi de là
  « castor » réveil.
 Conjuration de l’atout noir => inconscience => contact de Guénelorn.
 Discution, je lui raconte pour l’atout noir.
 Retapage à Greenvallds, Gwenaëlle est enceinte.
 Passage dans les Cours, phénomène magique qui nous oblige à aller dans l’ombre de Finndo.
  Magie d’invisibilité de Guénelorn.
  Diversion, marelle inversée, 4 Finndos !
  retour des finndo, combat, Démon très efficace. Imo révélé.
  Pose le pied sur la marelle, l’efface en parcourant celle de Corwin simultanément.
  Inconscience (c’est une habitude, mais j’ai du putainement progresser en endurance durant ce scénar !!!)
  la grotte s’écroule, passage avec « fil » de marelle qui donne sur une galerie des miroirs.
 Accueil mitigé par un Bénédict causant (!), Obéron, Osric, Finndo.
  Je blesse Osric par réflexe de métamoprhose, son aiguille ne passe pas la protection de la chaîne.
  Politesse diplomatiques
  Crunch chez Georges le sanguinolant.
  Tirage du tarot, décision vitale/mortelle prévue.
  Souterrains de la marelle
   remontée, tergiversations, grignotage par conjuration (Guenelorn ne le sait toujours pas !)
   => cette Ambre est uniquement magique, est-elle le danger ?
   Guénelorn trouve dans Ambre audela du miroir un joyau du jugement deformé, (il le laisse, un atout noir (le prend).
 Appel d’atout de Random, nous venons à son aide dans l’abysse contre 5 prêtres couillus psychiquement
  => inconscience (décidément !!!)
  en bas, bord de l’abysse
  changement de cotés de l’abysse (vortex)
  contact corwin

Pôle et la famille de Guénelorn.
 Robes des prêtres : blanches avec bandes bleu clair.
 Repos
 Marelle non, atout ? => Fi chaud, quelques réactions étranges de celui de Deirdre !
 Corwin
  miseau courant
  random a disparu
  part par l’abysse vers l’ombre de Finndo
 auberge, « tracteur », arrivée en ville.
 Pôle.
 Utilisation de l’atout noir.
 Bénédict est en train de combattre => rencontre des frères et soeurs de MARTIAL
  pour Martial :  Marwin,
    passage dans l’ombre de Finndo grâce à Guénelorn,
    récupération de walfesdge .Tournoi (remplacement de Finndo ?)
    passage dans l’ Ambre magique, emprisonnement
    porte éclatée par conjuration
    fouille. Bénédict, partie d’échec.
    Tour de passe passe de Marwin, fuite.
  Pour Guénelorn (sous réserve) :
    visite d'Ambre vieillissement, plusieurs enfants ?
    visite de greenvallds, fouille, magie puissante développée là.
    Ombre ?
    combat de sorcier. Guenelorn m’appelle, il vient à moi.
 Marwin part.
 Hôpital , don de bague de protection à quatre points pour Gwenaelle et Guénelorn.
 Voyage en Ombre par sentier forestier.
 Aggression de Drach, Guénelorn épuisé est inconscient.
 Le pb se résous
 la maison dans les bois.
 Cain, sa sorcellerie qui recrée la marelle (et les atouts ?)
 Cybelle (Sybel ?), coup de foudre.

 Scénario arrété sur un bon déjeuner prodigé par la sorcellerie de guénelorn.

Projets de Martial :
 1) rester à coté de Cybelle, mieux la connaître
 2) l’inviter à venir avec lui créer une jambe artificielle pour Sara (le projet mêle conjuration, objet de sang, dépend entre autres de la répartition des points attribué dans ce scénario là...)
 3) ne pas brusquer Cain et Drach, mais bel et bien réussir à conquérir Cybelle.

Séduction de Cybelle :
 Martial sera assez intimidé par ses sentiments. Il fera tout pour garder le contact avec Cybelle, craignant de la perdre définitivment si ils se séparent physiquement (=> proposition 2)). Tentative de mieux la connaître par discussions, activités en commun (si possible loin des autres).
 Martial ne se la jouera pas dur à cuire (difficile), mais tentera de faire ressortir l’artiste qui était en lui : ne comprenant pas les pouvoirs des trois enfants de son cousin (=> problème de l’inceste !), il tentera de séduire Cybelle avec les atouts de l’importe quel homme « normal » => pas trop de référence à leur statut d’êtres particuliers dans l’univers mais plutôt : imagination, sensibilité, connaissance des arts (seule concession à ses pouvoirs de voyage dans les cultures), sens de l’humour, tendresse avec une pointe de virilité.
 
 

Le 14/11/1997
11814ème aube
 

Notes sur la famille de Paris :
 Sara  f
 Marwin m
 Morwen f
 Weylin m
 Solian m
 

 Atouts

 

Originaux


 Le jeu standard comportant tous les membres de la première génération, Dworkin, Obéron et le grand hall du palais d’Ambre.
 

Obtenus


 Corwin, alias Arthur roi d’Avalon, réalisé par Corwin lui-même, avec un dos noir laissant s’épanouir une rose d’argent. Difficile à utiliser. Traverse toutes les barrières d’atouts.
 

Réalisés


 Les atouts de chaque membre connu de la seconde génération.

 Le portail du palais de Bénédict, ambassadeur d’Ambre à la cour du chaos.

 Le sommet du Kolvir, et les premières marches vers Tir-na nog’th.

 Un pont de bois sans ridelles surplombant un précipice déchiqueté, passant d’une montagne (à droite) à une rive plus basse couverte de forêt (à gauche). Le pont est piégé et un poids de 20 kg fait basculer le tablier sur le coté. Il faut forcer l’atout à se faire apparaître à l’extrême gauche de l’image pour être en terrain sûr. Au delà du pont, visible sur la droite, se trouve l’entrée d’une petite caverne.

 Mon lit et ma chambre du palais d’Ambre, avec une vue sur la fenêtre.

 Mon lit et ma chambre du palais de Rebma.

 Une pièce au sol dallé aux murs recouverts de lourd rideaux, éclairée par trois lampes à huile. L’une des dalles est fausse et pivote sur une petite fosse douillettement capitonnée qui se prolonge par un tunnel permettant de sortir de la salle. Deux secondes après l’apparition d’un intrus dans la pièce se déclenchent des rayons lasers espacés de 10 cm chacun, qui couvrent tout le volume de la pièce, y compris le ras du sol. Ils se redéclenchent encore  fois après 3,6,15 et 30 secondes. Le tout se trouve sur un astéroïde d’une ombre futuriste, avec des vivres, des soins, un stock de rideaux et une source d’énergie quasi inépuisable. Difficile à utiliser.

 La source du Bosquet de la Licorne. Difficile à utiliser.

 Le phare de Cabra. Difficle à utiliser.

 Les toilettes d’un grand astroport galactique et labyrinthique (idéal pour semer quelqu’un).

 Devant la porte des urgences d’un hôpital publique de qualité, derrière une colonnade, dans une ombre de tempo environ 4, subventionné tout les ans ambriens par moi-même.

 Dans une clairière d’une petite île paradisiaque contenant une mine de rubis à ciel ouvert.  Difficile à utiliser. Le dos de cet atout est aussi un atout, qui oppose une certaine résistance pour obtenir le contact, et qui donne sur un coffre en Ombre ayant exactement la même apparence extérieure que le dos des autres atouts à mes armes. Les plumes tournent et forment la combinaison du coffre. Celui-ci reste ouvert 3 secondes d’Ambre avant de se refermer brutalement et de se verrouiller automatiquement. Un compteur situé dans le mur sous le coffre indique le nombre d’ouvertures depuis la pose du coffre. Un capteur volumétrique déclenche un bombardement gamma dur pendant 15 secondes si quelque chose bouge dans le coffre une fois la porte refermée. Corwin a manipulé l’atout pour que l’accès au coffre soit facile pour moi mais surtout très discret pour autrui.

 Ma mère, la Reine Moire de Rebma.

 Orêve, haut de la falaise du village principal (voir les ombres).

 Mon voilier, le BlueWing.

 La Grande Marelle d’Ambre.

 Mes paquets d’atouts.

 « Copie » de l’atout noir. Résiste aux tentatives naturellement, de plus difficile à utiliser après l’intervention de Corwin.
 

Soit  54 atouts dans le paquet complet.
dont 26 de personnes et 28 de lieux (+1 pour le double atout)
 

En projet


 se contacter soi-même : téléportation à courte portée.

 atout stase

 faire des essais de contact et de rapt d’atout.

 l’atout d’un ennemi, le contacter alors qu’on est en chute libre et l’amener à soi. usage de la marelle ou d’un atout pour éviter une chute désagréable. => s’entraîner

 la licorne : pas forcément un atout : plutôt une grande tapisserie dans ma chambre d’Ambre.
 

Ombres

 Orêve : définie par Martial et Guénelorn lors d’une marche en Ombre à bord du BlueWing. Ombre non magique ( ne s’applique pas aux objets de Martial), faiblement techno-logique (pas de poudre, pas d’électricité), d’une culture proche des îles polynésiennes du XVIème siècle de l’ombre Terre. Habitée par des indigènes accueillants, ne connaissant pas la guerre, vivant de pêche (diverse et abondante) et de fruits (idem). Artisanat du bois et du cuir développé, peu de métallurgie, poterie. Grande île volcanique (calme, épanchement régulier et non explosif des laves), avec de nombreux récifs autour, sauf pour ce qui concerne le canal d’arrivé et les plages de surf. Peu ou pas de prédateurs dangereux (un peu de chasse sous-marine est possible). Village principal troglodyte situé dans un cirque naturel, avec un piton rocheux au centre (60m de haut), avec chenal donnant sur l’océan. Pas de points.
 

Artefacts et créatures :

légende : ( ) = possédé mais non acheté,   (( )) = non possédé, projet.

 -jeux d’atouts complets, recensés 2*2 = 4
 -bijoux d’ombres, à mes armes, tous de cultures différentes.
       chacun a  transfert de qualités (5) }  *2
  paroles (1)     } =12

Pouvoir Coût Description
invulnérabilité  4 chaîne de corps à maillons plats en argent avec un fermoir (à usage unique) en forme de petit blason.
doubles dommages (2) anneau d’argent ouvragé de style kabyle, avec deux plumes sur le blason, porté à l’annulaire droit.
barrière psychique (4) bracelet de câbles cuivrés et tressés. porté à gauche.
sens du danger,vocalise, variante de forme,vitalité animale 5 chaîne de pied faite de maillons larges de cuir marqués aux armes de Corwin, Martial et Moire ou étui d’atouts aux armes de Martial.
camouflage psychique ((2)) anneau d’or incrusté de lapis-lazuli.
vitesse d’un véhicule ((4)) fermoirs ouvragés en argent, sur une paire de chaussure + formes variables (2)+ autoréparation (1)
résistance aux armes à feu ((2*2=4)) anneaux de bronze, or, argent, cuivre, aluminium, platine frappés à mes armes

 -(Atour, étalon à la robe safran avec une petite étoile blanche sur le front. Il est rapide (2 pt) et possède un souffle ambrien (2 pt). Habitué à trois semaines de recherches en Ombre par la Marelle et le Logrus. Martial le monte le plus souvent avec une belle selle de cuir rouge à ses armes.)
 
 

Rushs non insérés dans le journal, réponses à quelques questions :


6- la première histoire d’amour.
en pension, adolescent. Mon meilleur copain et moi, on a flashé, dragué (très doucement) et finalement sorti avec des jumelles. Mon vieux prof de dessin, que j’aimais beaucoup et respectait énormément, avec qui on avait aucun secret, nous en a dissuadé puis a décrit point par point les mésaventures que nous allions connaître avec elles. Nous en avons rigolé mais tous c’est passé comme il l’a dit. Delphi (le nom de cette première tendre amie) l’a manoeuvré et traité comme une merde, le jetant à la fin de l’année de façon ignoble. Il en est resté profondément meurtri car il avait fantasmé une année durant sur elle et il était vraiment amoureux. Depuis, rien que des aventures où il s’est montré toujours très limite : « toutes des salopes  ».

8- auberge aimée morte, brigands capturés.
j’avais été un temps dans leur bande. Je sais qu’il font parti du folklore du voyage. Je les traîne dans une ombre limite chaotique pour leur apprendre la souffrance. 2 à 3 ans plus tard à l’échelle du lieu, je reviens les libérer et ne trouve personne. Morts, esclaves ou bien ayant tiré leur épingle du jeu, je ne sais.

17- la soirée idéale.
avec 1 ou 2 ami(es), découverte d’une fête ou théâtre / cérémonie d’une culture encore inconnue, avec un petit raid pour aller voler des souvenirs et finir autour du feu de camp/ salon de l’hôtel à discuter art et ombres.

21- le conjoint idéal.
 par lui : une poule qui tomberai sous son charme, dont la famille serait trop influente pour qu’il soit trop odieux avec elle, mondaine à souhait, pas chiante sur ses éventuelles infidélités.
 par moi (le joueur) : une femme intelligente, plus physique que lui, mais qui le suivrait dans ses pensées. Il aurait eu sa vie entre ses mains et aurait connu le bonheur de la sauver même si cela lui en coûtait sur un autre plan. Elle et lui  seraient fidèles, et arriveraient à se parler (dur-dur çà !). Tous leurs choix seraient fait en commun (dur aussi, mais très profitable pour lui).